Formation professionnelle
L’exécutif UMP a fait perdre en 5 ans à l’action régionale de formation professionnelle plus du quart de ses moyens. Comment dans ces conditions revitaliser l’économie de notre région ? L’élévation du niveau de qualification est pourtant un impératif, particulièrement en Alsace pour laquelle la formation initiale professionnelle (qui concerne les scolaires et les apprentis) en restait historiquement surtout aux CAP et aux BEP. Pour la formation continue (qui concerne la population active), il s’agit de la rendre accessible à ceux qui en ont le plus besoin (3/4 des non-diplômés n’en profitent pas). Et puis la formation professionnelle est un levier majeur pour fortifier les entreprises en accélérant les mutations nécessaires, celles de l’économie verte particulièrement.
Économie circulaire, transports décarbonnés, logements de qualité, efficacité énergétique et nouveaux services de solidarité ont besoin de professionnels qualifiés. Enfin, il faut débloquer les organisations multiples de formation pour qu’elles fassent preuve de synergie, de cohérence : le système illisible et inégal de formation professionnelle ne peut perpétuer ses rigidités, ses insuffisances et ses cloisonnements.
Il s’agit d’aider les dispositifs et les intervenants à s’humaniser, à prendre en compte, comme le dit Sylvie Grucker, « autant les souffrances, les blocages, les aspirations des personnes que les besoins des entreprises ». La formation professionnelle ne doit pas juste être un marché d’appels d’offres mais avant tout une forte démarche d’accompagnement et de construction personnalisée.
Ces enjeux ont été correctement ciblés par les services et se sont retrouvés dans la stratégie régionale mais il a manqué l’animation politique et les moyens budgétaires à la hauteur. Sylvie Grucker le résume ainsi : « Nous souhaitons une véritable ambition politique pour la formation continue et non une seule gestion technique, même de grande qualité ».
La formation continue : principale victime du rabot budgétaire
Ce régime strict était assumé sans détours par la Vice-présidente en charge : « Il ne s’agit pas de former pour former, mais de répondre aux besoins des entreprises. Le budget est calculé en fonction du besoin des entreprises. Il a donc baissé ». Cette baisse a entrainé, dès le début du mandat, un recentrage de la Région sur la formation des chômeurs non indemnisés (les jeunes). Ce fut l’abandon brutal de la ligne du mandat précédent qui avait rattrapé le retard de l’Alsace sur les autres régions en axant aussi sur les salariés les moins qualifiés, sur les salariés des entreprises en grande difficulté, en pesant pour le déploiement de la VAE (Validation des Acquis de l’Expérience, dispositif mal piloté par l’État). Bien sûr, ce désengagement régional fut habillé d’un discours sur une meilleure mobilisation des autres intervenants de la formation continue (l’État, les partenaires sociaux par Pôle emploi, les OPCA, organismes collecteurs de la taxe d’apprentissage). Mais, à ce jour, ainsi que le dénonce Jacques Fernique, « personne n’est en mesure d’apprécier et de mesurer l’effort global de formation professionnelle en Alsace, sa répartition précise entre les différents acteurs et son évolution face aux besoins criants ».
La Région s’est recentrée, mais même pour son cœur de métier elle est toujours très loin de l’objectif de 70% d’insertion à l’issue de ses formations. Pour celles visant l’emploi, à peine la moitié y parvient dont 37% de cette moitié en CDI. Pour les stagiaires des formations visant à la poursuite d’études, seuls 20% y parviennent effectivement. La conscience de ces difficultés a sans doute fait évoluer les dispositifs dans le sens des préconisations des écologistes : meilleure prise en compte des « décrocheurs/perdus de vue » (ils sont 13000 jeunes alsaciens non-insérés sans qualification et 3500 de plus chaque année), aides financières pour davantage de stagiaires (le défraiement journalier de base stagnait depuis des années à 10€), amélioration des contrats d’objectifs avec les branches professionnelles, qualité du réseau des responsables territoriaux de l’offre de formation, appel à projets pour construire des démarches intégrées et personnalisées de formation… Même si la loi n’y oblige pas la Région, il faudrait, par un budget plus consistant, renforcer les efforts vers les salariés les moins qualifiés, vers les secteurs et les entreprises les plus malmenés, trouver des solutions adaptées pour les plus âgés dont le chômage pèse lourdement, répondre aux demandes des petites entreprises pour anticiper et projeter leurs besoins en formation.
L'apprentissage, une responsabilité majeure de la région
La région décide des sections ouvertes dans les CFA (Centres de Formation d’Apprentis) et consacre environ 65 millions par an au financement de cette voie de formation en alternance dans laquelle s’engagent près de 15000 alsaciens.
Ce chiffre ne bouge guère depuis 2008, alors qu’il avait progressé de près de 75% sur les vingt années précédentes. Encore plus en Alsace qu’au plan national, la progression de l’apprentissage a été enrayée d’abord par l’aggravation de la crise, également par le passage difficile aux bacs pros 3 ans dès la sortie du collège, et enfin par le désengagement de l’État pour la prime aux employeurs (de 2013 à 2015, c'est sans doute 20 millions d'euros que l'apprentissage en Alsace aura perdu).
Dans ce contexte difficile, les efforts de la Région pour améliorer l’apprentissage ont été en phase avec les propositions des écologistes. Le changement d’image de l’apprentissage est manifeste, il est de moins en moins vécu comme une filière par défaut pour des relégués de la voie scolaire. Le niveau de qualification s’est élevé : nous avons pesé pour cela contre les conservatismes qui restaient rivés sur le modèle traditionnel de l’apprentissage de niveau infra-bac. Il reste à gagner un changement culturel pour que la jeunesse issue de l'immigration y ait un égal accès : il s’agit de toucher des parents que des parcours familiaux ont peu familiarisés avec l’apprentissage, il s’agit surtout, comme le dit Djamila Sonzogni, de « combattre les discriminations ». Celles-ci frappent plus naturellement dans cette voie de formation où la sélection par l’employeur s’exerce à l’entrée et de façon bien peu accompagnée.
Cet accompagnement profiterait de l’expérience réussie des classes DIMA (des 3èmes en CFA ou lycées pros assurant la découverte et l’insertion de jeunes motivés par l’alternance). Les écologistes s’y étaient opposés quand en 2005 il s’agissait de la formule simpliste de « l’apprentissage junior » en entreprise dès 14 ans. La formule a évolué, restant sous statut scolaire avec une qualité pédagogique et des moyens renforcés débouchant sur beaucoup de parcours réussis. Il serait bon de s’en inspirer pour construire des dispositifs d’accès à l’alternance pour les publics un peu plus âgés des missions locales.
Car si l’apprentissage se démocratise, se diversifie et se revalorise, il est nécessaire de viser à présent « une haute qualité éducative » pour reprendre l’expression de Jacques Fernique : faire acquérir des compétences techniques et assurer l’épanouissement de jeunes comme professionnels et comme citoyens. Ainsi, nous avons appuyé la démarche des CIP (Contrats d’Initiatives et de Progrès) avec chaque CFA : on y fixe tout ce qui donne corps à l’effort éducatif, culturel et citoyen pour que les temps forts de la formation de ces jeunes ne soient pas seulement ce qui se passe en entreprise.
La qualité de la formation doit en effet s’améliorer afin de réduire les ruptures de contrats, trop nombreuses (cela concerne un quart des contrats et presque un tiers au niveau V). Les Pays de Loire ont montré qu’il est possible de réduire ces ruptures à 10% par la formation des maîtres d’apprentissage et un suivi permettant que les difficultés d’horaires, de transport, d’équipement, de nature des tâches en entreprise, de comportements adolescents, d’abus d’encadrement parfois, ne basculent pas à tout coup dans le conflit et dans l’échec.
L’apprentissage est attractif s’il débouche sur l’emploi. Le groupe écologiste a obtenu que le taux d’insertion à l’issue de l’apprentissage soit l’indicateur majeur, suivi en continu. Son évolution montre la réussite ou l’échec de la politique régionale. Pour Jacques Fernique, « l’apprentissage doit être le moyen d’embaucher des jeunes bien formés et surtout pas l’aubaine de conditions d’alternance permettant de fonctionner avec un volant de personnel précaire et renouvelable à souhait ». La crise n’a pas fait de cadeaux : ce taux d’insertion a perdu 20 points depuis 2001, il est à 65% (à 55% pour le niveau V). Le défi urgent est d’enrayer la dégradation continue de ce taux d’insertion.
L'apprentissage transfrontalier... ... a été présenté comme une des grandes ambitions du mandat : son bilan en 5 ans est microscopique. En clair, depuis 2011, l’apprentissage transfrontalier c’est en 4 ans 26 jeunes en CAP/bac pro et 99 en post-bac. Cette formule prometteuse de double-alternance (formation théorique et pratique / en France et en Allemagne) n’a jamais décollé. Le groupe écologiste a proposé dès le début de revoir complètement la méthode et le dispositif car il faudrait constituer une agence pour assurer l’accompagnement des jeunes et des entreprises. Cette suggestion fait son chemin. L’enjeu du transfrontalier c’est aussi la mutualisation des bonnes pratiques de formation et d'alternance de part et d'autre du Rhin. |
L'essai non transformé de la politique jeunesse
Un des principaux défis que s’était assignée en 2010 la majorité, c’était l’action en faveur de la jeunesse en s’attaquant notamment à la question de l’orientation. Pour celle-ci, la mise en cohérence et en complémentarité des multiples acteurs est nécessaire : une charte régionale s’y efforce mais on n’avancera guère tant que le champ scolaire n’y sera pas pleinement intégré. Ça n’est pas l’opération annuelle du TER de l’orientation qui a changé la donne. Les actions pour la jeunesse ont été réorganisées avec la mise en place du nouveau Parlement des Jeunes. Il en est résulté un certain nombre de dispositifs aux impacts marginaux. Les contraintes budgétaires ont réduit l’effort de fonds pour les jeunes les plus en difficulté et les missions locales qui les prennent en charge dans les territoires. Au total, ainsi que l’analyse Djamila Sonzogni, « cette dispersion en mesurettes et cette réduction de crédits ont fragilisé les acteurs de terrain qu’il aurait fallu au contraire renforcer ».
Formations sanitaires et sociales : 14% des emplois alsaciens
Un pan important de la formation a été transféré aux Régions, celui du financement des formations sanitaires et sociales. Les élus régionaux ont travaillé à améliorer la vie des étudiants, par les bourses notamment. Pour les élèves infirmier(e)s, la priorité est de lutter contre les abandons en cours de formation, de l’ordre de 20%. Sylvie Grucker s’est ainsi fortement impliquée pour qu’il y ait un financement régional « d’ultime recours » pour les personnes n’obtenant pas la prise en charge du coût de formation par l’employeur ou l’OPCA. Pour les personnes sans-emploi, seuls les 2 premières années de la formation de 3 ans sont prises en charge, « une situation inadmissible pour des formations d’utilité sociale directe » assène Sylvie Grucker qui veut qu’on avance là-dessus.
Dans les lycées et centres de formation d'apprentis
Vos élus représentent la Région dans les Conseils d'administration et de perfectionnement : Andrée Buchmann au lycée Marc Bloch, aux lycées et CFA Emile Mathis et Aristide Briand |